Radu Comsa

Photo 1
Body-Paintings [free-standing cylinder
and Larousse], 2017
Medium density polyurethane foam (30kg/m3),
patchwork (cotton hoodie),
Dictionnaire de L'Art Contemporain (Larousse,1965)
120 x Ø 30 cm
Collections Frac-Artothèque Nouvelle-Aquitaine (inv. 201918)

Photo 2
Après le Disco
, 2017
Rideau de fil peint à la main, peinture textile
245 x 270 cm (3 x 245 x 90 cm)
Collection Frac Limousin (inv. 201919)
© DR

radu comsaradu comsa galerie emmanuel herve 1389

Radu Comsa, jeune peintre roumain né en 1975, a changé radicalement son point de vue et sa manière de faire en 2010 lors d’une exposition intitulée « Being Radu Comsa » à la galerie Sabot, Cluj-Napoca.
Auparavant, il faisait des peintures figuratives décrites ainsi par Marie Maertens : « Ses toiles font référence à une enfance rythmée par des visites d’usines, les travaux aux champs et les meetings de Ceaucescu »(1) . Il appartenait à cette génération de peintres roumains qui n’avait pas voulu partir à Bucarest, et qui grâce à l’implantation de galeries, d’ateliers d’artistes, restait à Cluj et commençait à attirer le milieu de l’art. Ses collègues roumains les plus connus étaient Adrian Ghenie et Victor Man ; d’autres commençaient à émerger, Bercea, Muresan, …tous pratiquaient la peinture dans l’héritage de Gerhard Richter et de Luc Tuymans. Pour cette exposition, il décida d’ériger deux plate-formes inclinées en bois clair et d’y présenter des formats circulaires aux diamètres variés sur lesquels il avait « copié » des détails de peintures de ses collègues. Accompagnée d’une brochure où étaient imprimés des extraits du « Journal » de Ionesco, l’exposition de Comsa semblait vouloir prendre de la distance vis-à-vis de ses amis peintres. Annoncée comme « une présentation de substituts de peintures et d’attitudes volées », l’exposition apporta une certaine confusion parmi les artistes. A partir de cette date, l’œuvre de Radu Comsa évolua vers une pratique « réductionniste » de la peinture. Désormais, il allait s’inspirer des grands maîtres, mais sans leurs techniques millénaires.
Comme le décrit précisément un critique « Comsa a abandonné l’utilisation de figures dans sa peinture en les remplaçant par des structures : fenêtres, crochets, socles, chaises et autres. Une fois ces structures couvertes de peinture, il a réalisé que le seul moyen pour redéfinir le rôle de la couleur et de la forme dans l’espace était d’arrêter de les peindre et de commencer à les faire… Plutôt que d’utiliser la toile comme une peinture, Radu Comsa la transforme en palette de grand format, un territoire neutre pour tester les couleurs qu’il utilisera ensuite pour peindre l’objet. Il utilise le mélange de couleurs par addition, de telle sorte qu’il peint des couleurs primaires pures diluées et non mélangées, dans des proportions variées, l’une sur l’autre » (2)
Prenons quelques exemples significatifs dans son évolution.
En 2011, Radu Comsa réalise une peinture «transmutée» en hissant le tableau au sommet d’une structure métallique, le tableau devenant une sorte de panneau appuyé au mur. Les motifs géométriques aux angles vifs, contrastés et colorés sont assemblés en morceaux de tissu, unis ou à motifs de chevrons, avec la technique du patchwork. En 2013, l’artiste aborde ses premières « transcriptions » visuelles à partir de morceaux de musique. Un diptyque en forme de rythmes horizontaux bleu et rose sur fond blanc d’après « Ainsi parlait Zarathustra » de Wagner ; une série de sept plaques de ciment travaillées en offset d’après les « Nocturnes » de Debussy, etc… En 2015, dans une série intitulée « géométrie atonale », il s’intéresse aux techniques de reproduction de l’image en quadrichromie (« CMYK grid on Grey »), ou sur écran (« RGB grid on Grey »). Il réunit en triptyques des tableaux de différentes taille et composition : superposition de tulle colorée (qui laisse voir le châssis en transparence), toiles préparées à la poudre de ciment et « graffitées » de gestes expressionnistes abstraits à l’huile, impressions laser à partir de colorants végétaux (betterave rouge, cassis). Notons encore une série d’œuvres intitulée « Golden Ratio » (nombre d’or) 2015, dont chacune est un « impromptu » basé sur les plans de l’architecte espagnol Josep Lluis Sert (3).
En 2017, Radu Comsa présente sa première exposition personnelle à Paris, galerie Emmanuel Hervé. Intitulée « Après le Disco », cette exposition réunit une série d’œuvres nommée « Passage introductif » où l’artiste assemble des toiles « teintes » avec la technique du batik. Entre chaque zone de couleur, une ligne blanche due à la cire chaude utilisée avant teinture sépare les formes, apportant une luminosité franche et contrastée. Chaque assemblage montre des zones rectangulaires ou rondes aux teintes vives, des formes déduites ou qui se prolongent sur le mur sous forme de monochromes. On sent que tout est proportionné, calculé à la règle et au compas. Sur le sol, une pièce tissée réunit trois formes essentielles (deux bandes rectangulaires et un quart de rond) aux couleurs primaires sur fond beige. En haut du mur, on aperçoit une projection vidéo. L’artiste a filmé en plongée verticale une peinture au sol de grand format où un cycliste acrobate exécute des figures, à la surface de la composition géométrique.
Mais c’est surtout l’œuvre installée au seuil de l’exposition, un triple rideau de fils suspendus de grand format (245x270) qui nous intéresse. On y retrouve la même composition géométrique que sur la peinture/sol de la vidéo. Chaque fil a été peint à la main de façon à suivre la souplesse du support. Un grand rond jaune, un rectangle magenta, un rectangle et un quart de rond vert, un rectangle et un angle cyan flottent sur l’écheveau blanc du rideau, filtrant les images et laissant passer la lumière. Il est ainsi frappant de visionner la photographie de l’entrée de l’exposition (4) pour se persuader de la vibration sensible et coordonnée soudain obtenue par cette œuvre. De même, on observera avec attention la photographie de cette même œuvre prise à contre-jour, depuis l’intérieur de la galerie vers l’extérieur, pour constater que la vision est rendue totalement différente par le contraste lumineux. Ainsi, cette œuvre nous propose deux points de vue différents selon son recto et son verso, et surtout selon la répartition de la lumière. Si elle nous fait bien sûr penser aux fameux « pénétrables » de Jesus Rafael Soto des années 1960-70, et à l’art cinétique de l’époque, il ne s’agit pourtant ici que d’une simple tranche d’espace, aussi fluide qu’un rideau de porte, qui laisse passer le regard et le moindre souffle d’air.

Comme le souligne avec enthousiasme Calin Dan lorsqu’il introduit l’exposition actuelle de Radu Comsa au MNAC de Bucaret, « son œuvre est là, puissante et abondante, et en même temps délicate et malgré tout confinée dans une aire de discrétion. Radu Comsa médite, lit, cherche des analogies pour des traductions. Il y a un énorme effort souterrain dans ses carnets de notes, et cette dimension secrète du travail de l’artiste est toujours une garantie de la qualité intellectuelle de l’œuvre… »(5)
Dans un questionnaire publié l’an dernier en ligne, l’artiste se souvient de son premier contact avec l’art au moment où, lorsqu’il est enfant, vers 7 ou 8 ans, il reçoit un livre sur Piero Della Francesca comme cadeau d’anniversaire et qu’il commence à le copier scrupuleusement. Il décrit également sa table de travail : « le livre d’Abraham Moles, « Art et ordinateur », des marqueurs rouge, vert et bleu, des crayons de couleurs, deux taille-crayons, un compas, une règle, un cutter, une paire de lunettes de soleil, trois carnets à dessin ». On apprend que son film préféré est « La montagne sacrée » d’Alejandro Jodorowski, que ses artistes favoris sont Paul Signac, Theo Van Doesburg, Laszlo Moholy-Nagy, Josef Albers, Jean Prouvé, Guillaume Apollinaire, Anton Stankowski, et ses musiciens fétiches, Arvo Pärt, Giorgy Ligeti, Arnold Schönberg et Steve Reich. Aux formules lapidaires de définir son travail, il répond « oblique et transmutable » ou de résumer sa recherche en une phrase, il annonce vouloir obstinément « traduire ses œuvres en musique ». Il aimerait bien voir ses œuvres dans les collections du Museum Haus Konstruktiv de Zürich (6).
Pour l’instant, cet été, Radu Comsa expose au Musée National d’Art Contemporain de Bucarest. On aimerait beaucoup y aller pour visiter son exposition « Discussion réductionniste en quatre couleurs » et vérifier l’enthousiasme du conservateur Calin Dan lorsqu’il conclut : « Dans un contexte qui aspire, au mieux, à Gerhard Richter, Radu Comsa rêve du Bauhaus, du Corbusier et de Jean Prouvé. Son œuvre est une expansion continue de la peinture dans le monde réel, un refus de l’utopie, un jeu de conquête. Dans le monde de Radu, tout repose sur les couleurs. Elles sont fermes, plates, énergiques, mais, plus important encore, elles sont intégrées dans les matériaux. Comsa comprend la peinture comme une nouvelle dimension du monde, pas comme un monde en soi »(7)

Yannick Miloux

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